L’entreprise mondiale de navigation et de logistique poursuit l’objectif ambitieux d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Il faut agir tout de suite, d’après Ingrid Marie Vincent Andersen, responsable des objectifs de décarbonation et de l’analyse du cycle de vie chez Maersk, qui a récemment fait équipe avec Preferred by Nature dans le cadre de sa recherche de matières premières pour des biocarburants durables.
700 navires, 10 millions de tonnes de carburant fossile et 32 millions de tonnes de CO². Décarboner l’une des plus grandes entreprises de navigation au monde est loin d’être facile. Pourtant, c’est ce que Maersk aspire à faire.
En tant que responsable des objectifs de décarbonation et de l’ACV, Ingrid Marie Vincent Andersen a du pain sur la planche :
« Bien que l’efficacité énergétique de notre flotte se soit améliorée de plus de 45 pour cent depuis 2008 pour ce qui est des émissions de CO² par conteneur transporté, cela ne nous permettra pas d’atteindre la neutralité carbone. Nous avons besoin d’autres solutions, comme de nouveaux carburants. 2050 est encore loin, mais attendre qu’une solution apparaisse comme par magie ne nous semble pas efficace. Nous devons agir tout de suite. Notre tâche principale est de transformer une ambition à long terme en mesures à court terme », déclare Mme Andersen.
« Nous devons analyser les risques de près »
Depuis son bureau avec vue sur le port de Copenhague, au sein du siège de Maersk, Mme Andersen explique qu’elle et son équipe sont en train de chercher différents carburants marins pour relever l'immense défi que représente la décarbonation de la flotte :
« Nous sommes convaincus que le méthanol sera notre solution à moyen terme : nous avons donc commandé en août huit porte-conteneurs au méthanol qui seront livrés à partir de 2024. Mais le seul moyen de réduire les émissions de nos bateaux à court terme est d’utiliser du biodiesel. Ce genre de carburant fonctionne dans les moteurs existants et on trouve un large éventail de biodiesels fabriqués à partir de différentes matières premières. La difficulté est d’identifier les matières premières qui sont durables et la quantité de biodiesel que nous pouvons acheter sur le marché sans créer d’effets de substitution ailleurs », nuance Ingrid Marie Vincent Andersen.
Le marché mondial des biocarburants est en constante augmentation depuis une dizaine d’années et devrait atteindre 154 milliards de dollars en 2024. Cependant, les matières premières utilisées pour la fabrication de biodiesel ne sont pas toujours produites ou utilisées de manière durable. L'huile de palme en est peut-être l’exemple le plus controversé. Pour Maersk, il est crucial de n’utiliser que des biocarburants à base de matières premières durables. L’entreprise utilise notamment du biodiesel fabriqué à partir d’huile de cuisson.
« Pour nous, il est impératif que notre approvisionnement en biocarburants ne participe pas à la conversion des terres ou à la déforestation. Nous devons analyser les risques de près et nous assurer que les matières premières auxquelles nous nous intéressons ne pourraient pas être mieux utilisées ailleurs, par exemple dans l’alimentation », affirme Ingrid Marie Vincent Andersen.
Les déchets comme matières premières
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Pour identifier les éventuels risques de durabilité, Maersk collabore étroitement avec Preferred by Nature et utilise son cadre de durabilité. Cet outil permet aux petites et grandes entreprises d’adopter une approche plus large et approfondie des analyses du risque que les normes de certification individuelles. L’analyse effectuée dans ce cadre a ainsi concerné plusieurs déchets utilisés comme matières premières et s’est intéressée à un large éventail de risques.
« Nous sommes convaincus qu'il est possible d’utiliser des déchets comme matières premières de manière durable, mais nous devons pour cela mener une analyse du risque approfondie et nous assurer que cela ne pose aucun risque de mélange avec d’autres déchets, de travail des enfants, d’esclavage ou de corruption », indique Mme Andersen.
« C’est une tâche très complexe. Les risques liés à chaque matière première peuvent dépendre en grande partie de l’endroit du monde où elle est collectée. Une matière première peut être durable si elle provient d’Europe, mais peut poser plusieurs risques lorsqu’elle est achetée dans d’autres régions, comme l’Amérique du Sud : une couverture de certification insuffisante, des systèmes de contrôle et d’audit défaillants, des déchets qui n’en sont pas vraiment. En définitive, notre approvisionnement pourrait participer indirectement à la déforestation, par exemple », souligne Mme Andersen.
Une connaissance essentielle
Le cadre de durabilité de Preferred by Nature a permis à Maersk d’identifier les risques de durabilité liés à l’approvisionnement en matières premières :
« Notre coopération avec Preferred by Nature a été incroyablement précieuse. Je suis très impressionnée par la connaissance qu’a l’ONG des risques locaux, ce qui est essentiel lorsque l'on travaille dans ce secteur. Preferred by Nature nous livre un travail très approfondi », conclut Ingrid Marie Vincent Andersen.